Le compte-titres ordinaire (CTO) est accessible partout dans le monde, mais sa fiscalité devient plus complexe dès que vous quittez la France : retenues à la source, conventions fiscales, crédits d’impôt, obligations déclaratives ; autant de paramètres qui peuvent modifier vos revenus nets. Cet article vous explique comment fonctionnent ces mécanismes, selon la nature des flux et le rôle de votre intermédiaire, afin de vous aider à optimiser la gestion de votre patrimoine à l’international.
Sommaire
Les points clés à retenir :
- Résidence fiscale avant tout : ce n’est plus la France qui prime, mais le pays où vous êtes fiscalement résident. C’est lui qui définit l’imposition principale, les retenues à la source n’étant que résiduelles.
- Dividendes, intérêts, plus-values = règles différentes : les dividendes subissent presque toujours une WHT au pays source, les intérêts bénéficient d’exonérations fréquentes, et les plus-values relèvent en principe du pays de résidence (sauf exceptions).
- Relief vs Reclaim : pour éviter la double imposition, deux chemins existent : appliquer le bon taux dès le départ (relief at source) ou récupérer l’excédent après coup (reclaim), plus long et coûteux.
- Qui détient les actifs change tout : en CTO direct, vous êtes beneficial owner et pouvez bénéficier des traités ; dans une enveloppe assurance/plateforme, c’est souvent l’assureur qui est reconnu, et les WHT peuvent rester définitives.
Vous détenez un CTO depuis l’étranger ? Nous vous proposons de vous accompagner pour analyser votre fiscalité et sécuriser vos investissements Contactez nous dès à présent pour recevoir un bilan patrimonial. Je réserve mon créneau !
Comment fonctionne l’imposition pour un CTO détenu à l’étranger ?
Tout CTO détenu depuis l’étranger obéit à trois règles simples : votre pays de résidence impose en premier, le pays de la source peut retenir une part, et les conventions fiscales organisent le partage. Côté France, les prélèvements sociaux s’arrêtent sur vos revenus mobiliers dès que vous êtes non-résident, mais restent applicables sur l’immobilier.
Règle n°1 : Votre pays de résidence impose en priorité
La règle-mère est simple, le pays de résidence fiscale détient en principe le droit d’imposer vos revenus de capitaux mobiliers et plus-values. Le pays de la source (là où est localisée la société qui verse le dividende, l’émetteur de l’obligation, etc.) peut toutefois prélever une retenue à la source (WHT).
L’arbitrage entre ces droits d’imposition se fait via la convention fiscale bilatérale applicable ; à défaut de convention, le risque de double imposition existe. Ces principes découlent du Modèle de Convention de l’OCDE (dividendes, intérêts, gains en capital) et de sa logique d’allocation des droits entre État de résidence et État de la source.
Sans convention applicable, chaque État applique son droit interne (WHT au pays source + imposition potentielle au pays de résidence), sans mécanisme coordonné d’élimination de la double imposition.
Règle n°2 : Le pays de la source peut appliquer une retenue (WHT)
Une convention prévoit en pratique deux voies pour éviter la double imposition sur les flux transfrontaliers :
- Relief at source : application dès le paiement d’un taux réduit de WHT (ou exonération) si l’investisseur fournit les bons justificatifs (ex. certificat de résidence, W-8BEN pour les États-Unis) et si l’intermédiaire est en mesure d’appliquer le traité.
- Reclaim : récupération a posteriori de « l’excess WHT” quand le taux prélevé dépasse le taux conventionnel ; procédure souvent lourde et hétérogène selon les pays (délais, formulaires, originaux exigés).
En filigrane, la convention précise qui peut bénéficier du traité (notamment la notion de beneficial owner pour les dividendes/intérêts) et comment s’élimine la double imposition du côté résidence (crédit d’impôt, exemption, etc.), conformément au commentaire OCDE.
Règle n°3 : La convention fiscale pour éviter la double imposition
Un point fiscal très intéressant pour les expatriés est que les prélèvements sociaux français (CSG/CRDS, etc.) ne s’appliquent pas aux revenus mobiliers des non-résidents fiscaux ; ces contributions restent en revanche dues, pour les non-résidents, sur certains revenus immobiliers de source française (loyers, plus-values), sous conditions.
Autrement dit, avec un CTO et des revenus mobiliers (dividendes, intérêts, plus-values mobilières), ce sont les contributions du pays de résidence qui s’appliquent le cas échéant, pas les prélèvements sociaux français. Pour l’immobilier français, le régime est distinct et doit être traité à part.
Bonne patrique : vérifiez toujours la législation sociale/fiscale de votre pays de résidence (cotisations, surtaxes locales) et, côté France, distinguez bien revenus mobiliers (CTO) et revenus immobiliers afin d’éviter les confusions sur l’application des prélèvements sociaux.
Comment sont imposés vos revenus et plus-values à l’étranger ?
Quand on vit à l’étranger, un même portefeuille peut produire des nets très différents selon la nature du revenu. Dividendes, intérêts et plus-values n’obéissent pas aux mêmes règles : l’un sera d’abord frappé à la source, l’autre bénéficiera d’exonérations fréquentes, le dernier relèvera surtout du pays de résidence. Comprendre cette mécanique évite les mauvaises surprises et permet d’organiser, en amont, formulaires, certificats et preuves nécessaires.
L’imposition des dividendes et la retenue à la source
Pour les dividendes, le mouvement commence presque toujours au pays de l’émetteur, avec une retenue à la source (WHT). Si votre situation est correctement documentée (traité applicable, beneficial owner reconnu, formulaires à jour), cette retenue peut être réduite dès le paiement (relief at source). À défaut, elle reste prélevée au taux interne et vous devez envisager un reclaim ultérieur.
La seconde étape se joue dans votre pays de résidence, qui impose le dividende selon ses propres règles, tout en accordant en principe un crédit d’impôt correspondant à la retenue conventionnelle.
- Aux États-Unis, le cadre illustre bien ce mécanisme : le taux par défaut est 30 % pour un non-résident, ramené le plus souvent à 15 % si un W-8BEN/W-8BEN-E valide est entre les mains d’un intermédiaire capable d’appliquer le traité.
- Et si le dividende provient d’un fonds/ETF, n’oublions pas l’étage “amont” : le fonds subit déjà sa propre WHT en fonction de son pays de domiciliation (ETF US, irlandais, luxembourgeois…), somme qui n’est généralement pas récupérable par l’investisseur final.
La distribution que vous percevez peut ensuite, selon les pays, subir ou non une nouvelle retenue, avant l’imposition au pays de résidence.
La fiscalité des intérêts d’obligations
Le film ressemble à celui des dividendes mais le scénario comporte plus d’exceptions favorables. Plusieurs juridictions exonèrent tout ou partie des intérêts d’obligations d’État versés à des non-résidents ; côté US, certaines catégories permettent aussi un paiement sans retenue si la documentation est en ordre.
La vigilance porte sur la qualification : un coupon classique ne se traite pas comme un OID (escompte d’émission) ou comme des intérêts “substituts” issus d’un prêt de titres. Bien qualifier l’instrument, fournir les certificats et vérifier les clauses d’exonération sont les trois leviers qui font la différence.
L’imposition des plus-values mobilières : le principe de résidence
Ici, le centre de gravité bascule côté résidence fiscale : en règle générale, la plus-value de cession d’actions, d’ETF ou d’obligations est imposée là où vous résidez, non au pays de la société émettrice.
Des exceptions existent toutefois dans certains traités, notamment en cas de participation substantielle (un seuil élevé donnant au pays de la source un droit d’imposer) ou pour des titres à prépondérance immobilière, lorsque l’essentiel de la valeur renvoie à de l’immobilier situé dans le pays source.
Avant une vente significative, cartographier ces clauses, vérifier le ratio immobilier éventuel et documenter prix de revient et dates évite les frictions au dépôt de la déclaration.
Départ de France & “Exit Tax”
Quitter la France avec des plus-values latentes peut déclencher un régime d’Exit Tax : déclarations spécifiques, sursis sous conditions, et perte du sursis en cas de cession. Le sujet est distinct de la fiscalité courante du CTO, mais il mérite d’être anticipé et documenté (valeurs d’acquisition, historiques).
Bon à savoir : les règles successorales d’un CTO détenu à l’étranger diffèrent selon le pays et la convention fiscale applicable. Nous les expliquons dans cet article dédié : CTO et succession internationale.
Accompagnement gratuit
Votre situation patrimoniale mérite une approche sur mesure. Prenez rendez-vous avec l’un de nos conseillers en gestion de patrimoine pour optimiser la fiscalité de votre CTO à l’international. Je réserve mon créneau !
Relief at source vs Reclaim : comment ne pas payer l’impôt deux fois ?
Sur des flux transfrontaliers, vous avez deux manières d’éviter de payer plus que le taux prévu par les conventions : obtenir le bon taux dès le paiement (relief at source) ou récupérer l’excédent après coup (reclaim). La première voie est la plus propre et la moins coûteuse ; la seconde est votre filet de sécurité quand la retenue a déjà été opérée au taux plein.
Le « Relief at source » : appliquer le bon taux d’impôt immédiatement
Le relief at source consiste à faire appliquer immédiatement le taux réduit prévu par le traité entre le pays de la source et votre pays de résidence. Pour y parvenir, trois ingrédients sont indispensables et doivent être synchronisés :
- les formulaires adéquats (ex. W-8BEN/W-8BEN-E côté US, ou formulaires locaux selon les marchés),
- un certificat de résidence fiscale à jour (souvent annuel),
- un intermédiaire (broker/custodian/withholding agent) qui reconnaît votre statut de beneficial owner et sait porter ce statut jusqu’au payeur.
Les échecs du relief viennent rarement de la règle, mais de l’opérationnel : formulaires expirés, comptes multi-titulaires mal paramétrés (un co-titulaire mal documenté bloque le taux réduit), chaînes d’intermédiation longues où l’information se perd.
Pour les fonds/ETF, une absence de transparence : la WHT est souvent prélevée en amont au niveau du fonds et ne vous est pas attribuée personnellement, ce qui empêche le traité d’être appliqué à votre nom.
Astuce : créez un calendrier d’expiration de vos formulaires et certificats (W-8 : validité pluriannuelle mais à surveiller ; certificats de résidence : à renouveler chaque année fiscale).
Le « Reclaim » : récupérer un trop-perçu de retenue à la source
Si la retenue a été opérée au taux interne (ou à un taux supérieur au taux de traité), vous pouvez tenter un reclaim auprès de l’administration du pays source pour récupérer l’excess WHT. Le dossier doit prouver votre droit au taux conventionnel et l’encaissement du revenu.
Dossier-type à préparer :
- Attestation de retenue / relevé de dividendes (ou coupons) mentionnant le taux prélevé et le montant.
- Certificat de résidence fiscale couvrant la période du paiement.
- Formulaire officiel du pays source (ex. formulaires ESTV pour la Suisse, modèles locaux ailleurs), parfois à faire viser par votre administration de résidence.
- Pièces du courtier : avis de paiement, état annuel, voire lettre confirmant votre statut de beneficial owner.
Selon les juridictions, comptez 6 à 24 mois entre le dépôt et le remboursement effectif. Certains courtiers proposent un service payant (forfait ou pourcentage sur les montants récupérés) ; à défaut, vous pouvez mandater un agent fiscal local. Évaluez toujours le ratio coût / montant récupérable avant d’engager la procédure.
Bon réflexe : lancer le reclaim au fil de l’eau (trimestriel / semestriel) plutôt que d’accumuler plusieurs années, pour sécuriser les preuves et éviter les prescriptions.
CTO via broker ou assurance : L’impact sur la WHT
Deux expatriés peuvent toucher des montants nets très différents sur un même dividende selon qui est reconnu comme bénéficiaire effectif (beneficial owner) et qui agit comme withholding agent dans la chaîne de paiement. C’est ce point qui conditionne l’application du taux de traité à la source (relief) ou, à défaut, la nécessité d’un reclaim a posteriori.
Cas n°1 : Le CTO en direct chez un courtier (Broker)
Beneficial owner = vous. Le broker/custodian détient les titres en “street name”, mais c’est lui qui agit comme withholding agent (souvent sous accord QI aux États-Unis). Dans ce schéma, les avantages de traité sont personnalisés jusqu’au titulaire.
Conséquences (opérationnel)
- US : vous remettez un W-8BEN / W-8BEN-E au broker ; le broker applique à la source le taux conventionnel sur les dividendes (sinon 30 % par défaut) et vous délivre un Form 1042-S nominatif.
- Autres pays : le relief exige souvent un certificat de résidence et/ou des formulaires locaux ; à défaut, on procède par reclaim auprès de l’administration du pays source.
À faire (check-list)
- W-8 valide et à jour chez le broker, sinon retour au taux plein.
- Vérifier les taux réellement appliqués sur chaque paiement (rapports du broker).
- Archiver tous les justificatifs (1042-S, avis de paiement, certificats) pour d’éventuels reclaims.
Cas n°2 : Les titres via une assurance-vie ou plateforme
Legal owner = l’assureur/plateforme (vous n’êtes que bénéficiaire économique de la police). Dans nombre de juridictions, les autorités n’opèrent pas de “look-through” au niveau du preneur individuel ; l’entité assurantielle (ou le fonds sous-jacent) est traitée comme le réel récipiendaire du dividende/du coupon.
Conséquence : le taux statutaire ou un taux non personnalisé peut s’appliquer, et l’avantage de traité peut ne pas vous être transmis au niveau de la police. Cela découle de la logique “beneficial owner” des commentaires OCDE : l’avantage conventionnel suit le bénéficiaire effectif reconnu, pas nécessairement l’épargnant final d’une enveloppe.
Conséquences (opérationnel)
- WHT potentiellement “bloquée” au niveau des titres/fonds si l’intermédiaire reconnu n’est pas vous : l’administration ne voit pas votre statut ni vos formulaires, donc pas de relief personnalisé (ex. dividendes US pouvant rester à 30 % si aucun mécanisme de transparence n’est reconnu).
- Reclaim : souvent non proposé au niveau de la police et très dépendant de la politique de l’assureur/du fonds (procédures, pays couverts, délais, frais). (À comparer avec les procédures officielles de remboursement : ex. Suisse/ESTV.)
À vérifier par écrit (indispensable)
- Qui est reconnu beneficial owner par marché (US, CH, etc.) ?
- L’assureur/la plateforme ou le fonds appliquent-ils un look-through permettant un relief at source ?
- Un service de reclaim existe-t-il (sur quels pays, quels délais, quels coûts) ?
Bon à savoir : une enveloppe “gross roll-up” (assurance, plateforme) n’annule pas systématiquement les retenues à la source d’origine : faute de transparence et de reconnaissance du beneficial owner, ces WHT peuvent rester définitives et non récupérables pour l’épargnant.
Accompagnement gratuit
Votre situation patrimoniale mérite une approche sur mesure. Prenez rendez-vous avec l’un de nos conseillers en gestion de patrimoine pour optimiser la fiscalité de votre CTO à l’international. Je réserve mon créneau !
Les questions les plus posées
Non pour les titres financiers classiques. Oui si ces titres sont des sociétés à prépondérance immobilière françaises, car leur valeur est intégrée à l’assiette IFI, même pour un non-résident.
Très élevés : dividendes et plus-values sont libellés dans la devise du marché (USD, CHF, GBP…). Un CTO en multi-devises chez un broker global limite les frais de conversion et permet une gestion plus fine des risques FX.
Vous devrez déclarer ce compte via le formulaire 3916-bis, et vos plus-values/dividendes redeviendront imposables au PFU (ou barème progressif). Attention aussi au traitement des revenus différés (dividendes accumulés, plus-values latentes).
Oui, mais la fiscalité dépendra de la résidence fiscale de la holding. Dans certains pays, cela permet d’optimiser l’imposition des dividendes (régime mère-fille, participation exemption).
Oui, mais la gestion fiscale dépendra de la reconnaissance des co-titulaires dans le pays de résidence et de la documentation fournie pour le relief WHT.
Non. Les brokers type IBKR le font (1042-S nominatif), mais certaines plateformes locales ou assureurs n’offrent qu’un reporting agrégé, rendant plus difficile l’imputation des crédits d’impôt.